Quand on parle de congés payés, on pense généralement aux cinq semaines classiques. Mais en réalité, certaines situations donnent droit à des jours supplémentaires, appelés jours de fractionnement.
Sommaire
Ces droits sont encore méconnus des salarié·es, et parfois ignorés par les employeurs. Alors que faire quand ces jours n’ont jamais été accordés ? Et surtout, peut-on les réclamer rétroactivement ?
Si vous avez pris une partie de vos congés principaux en dehors de la période légale (du 1er mai au 31 octobre), vous pouvez avoir droit à 1 ou 2 jours de congé supplémentaires, appelés jours de fractionnement. En l’absence d’accord spécifique dans l’entreprise, ces jours doivent être accordés automatiquement. Si ce n’est pas le cas, vous pouvez réclamer une rétroactivité sur 3 ans (article L3245-1 du Code du travail).
Qu’est-ce qu’un jour de fractionnement ?
Les jours de fractionnement sont des congés supplémentaires que le Code du travail prévoit dans certains cas précis. Ils concernent uniquement les congés payés principaux, c’est-à-dire les 4 premières semaines (hors 5e semaine, RTT ou congés conventionnels).
Ils s’appliquent quand une partie de ces congés est prise hors de la période légale (1er mai au 31 octobre). L’idée est simple : quand un salarié ne peut pas poser tous ses congés en été à cause de l’organisation de l’entreprise, il peut obtenir une compensation sous forme de jours en plus.
Voici comment cela fonctionne :
Si vous prenez au moins 3 jours de congé principal après le 31 octobre, vous avez droit à 1 jour supplémentaire
Si vous prenez au moins 6 jours, vous avez droit à 2 jours supplémentaires
Ces jours ne sont pas automatiques si le fractionnement vient à la demande du salarié, mais le deviennent si c’est imposé par l’entreprise (notamment lors de fermetures annuelles ou d’un refus de congés en été).
💡 Exemple : Votre entreprise ferme trois semaines en août et une en décembre. Il vous reste une semaine à poser, mais on vous l’impose en novembre : vous êtes dans le cas typique ouvrant droit au fractionnement.
Ce droit est prévu à l’article L3141-19 du Code du travail. Il peut être modifié ou supprimé par un accord d’entreprise ou une convention collective, ce qui est le cas dans certains secteurs (comme le BTP ou la métallurgie). Vérifiez donc toujours si un accord dérogatoire existe. En cas de doute, rapprochez-vous du service RH ou de vos représentants du personnel.
Rétroactivité des jours de fractionnement : ce que dit la loi
Vous venez de découvrir que vous auriez dû bénéficier de ces jours supplémentaires ? Pas de panique, la loi française prévoit un recours, mais dans un délai limité.
Depuis le 17 juin 2013, la prescription en matière de salaires et d’accessoires de salaire (dont les congés payés font partie) est fixée à 3 ans (article L3245-1 du Code du travail). Vous pouvez doncréclamer les jours de fractionnement non attribués ou leur équivalent en indemnité pour les 3 années précédentes.
En clair :
➡️ En 2025, vous pouvez faire une réclamation pour les années 2022, 2023 et 2024
➡️ Au-delà, le droit est prescrit, sauf interruption du délai (par exemple via une procédure prud’homale)
Dans la pratique, l’employeur doit soit vous accorder les jours non pris, soit vous indemniser. La rétroactivité ne se limite pas à un « geste » : c’est un droit reconnu par la loi, à condition d’en faire la demande dans les délais.
Si vous constatez une irrégularité sur votre bulletin de paie (absence de mention des jours de fractionnement), discutez-en avec vos délégués du personnel ou un défenseur syndical. Des plateformes comme Hello Avocat, Syndex ou Maître Lucas proposent aussi des accompagnements adaptés.
Pour éviter toute ambiguïté, voici un tableau récapitulatif :
Situation du congé | Droit à jour de fractionnement | Conditions |
---|---|---|
3 à 5 jours pris hors période | 1 jour | Hors période 1er mai – 31 octobre |
6 jours ou plus pris hors période | 2 jours | Même condition |
Accord collectif existant | Variable | Peut supprimer ou modifier le droit |
Délai de réclamation | 3 ans | Selon l’article L3245-1 du Code du travail |
Quels recours pour réclamer les jours de fractionnement non versés ?
Découvrir qu’un droit n’a pas été respecté est toujours frustrant. Heureusement, plusieurs solutions existent pour faire valoir vos jours de fractionnement non perçus. Que ce soit en interne ou par voie externe, l’objectif est de rétablir vos droits sans créer de conflit inutile.
Pour faire reconnaître vos jours de fractionnement non attribués, commencez toujours par une démarche amiable auprès de votre entreprise. Si rien ne bouge, vous pouvez faire une réclamation formelle, vous appuyer sur vos représentants du personnel, ou même saisir le conseil de prud’hommes. La rétroactivité est limitée à 3 ans, agissez rapidement.
Parlez-en aux représentants du personnel
Dans la majorité des cas, un simple échange avec un représentant du personnel ou un membre du CSE permet de clarifier la situation. Ces interlocuteurs sont là pour défendre vos droits, et peuvent intervenir auprès de l’employeur pour faire rectifier les choses.
Cette voie est particulièrement utile si :
plusieurs salarié·es sont concerné·es
il existe un doute sur l’application de l’accord collectif
vous souhaitez éviter une démarche individuelle frontale
Si votre entreprise n’a pas de CSE, vous pouvez contacter un syndicat local ou consulter les défenseurs syndicaux recensés sur le site de votre DREETS (ex-DIRECCTE).
Faites une demande écrite à l’employeur
Si aucune solution ne se dessine après un échange informel, vous pouvez rédiger une lettre de réclamation adressée à votre employeur ou au service RH. Cette lettre doit être claire, datée, et appuyée sur le Code du travail.
Mentionnez :
les années concernées (dans la limite des 3 ans)
les périodes de congés prises hors délai légal
l’absence de jours de fractionnement sur vos bulletins de paie
votre demande de régularisation (jours à prendre ou indemnité compensatrice)
💡 Astuce : Envoyez votre courrier en recommandé avec accusé de réception pour laisser une trace. Des modèles de courrier sont proposés par des sites comme service-public.fr, Juritravail, ou avostart.fr.
Si nécessaire, engagez une démarche juridique
Si l’employeur ne répond pas ou refuse de régulariser, vous pouvez saisir le conseil de prud’hommes. Cette démarche peut sembler impressionnante, mais elle est gratuite et accessible sans avocat pour des montants inférieurs à 5 000 euros.
Des services comme Hello Avocat ou Justifit peuvent vous assister dans la constitution de votre dossier, pour environ 29 à 49 euros selon les cas.
🔍 Bon à savoir : Le conseil de prud’hommes peut vous accorder une indemnité compensatrice si vos droits ne sont pas respectés. La preuve repose sur vos bulletins de salaire, mails internes, calendrier de congés ou attestations.
Que faire concrètement ?
Voici une démarche en 3 étapes pour structurer votre demande :
Vérifiez votre situation : regardez vos congés posés, vos bulletins de paie, les dates de prise des congés, et si un accord collectif existe
Formulez une demande claire : d’abord oralement, puis par écrit
Cherchez un appui externe : syndicats, CSE, défenseur syndical, ou accompagnement juridique si nécessaire