Rien de tel qu’un contrôle surprise de l’inspection du travail pour faire grimper votre stress d’un coup.
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Dirigeant, responsable RH ou gérant de petite structure, ce genre de visite déclenche souvent un tas de questions. Et si un document manquait ? Et si un affichage n’était pas à jour ?
L’objectif de cet article, c’est de vous aider à y voir clair. On ne va pas vous noyer sous le jargon. À la place, vous allez comprendre ce que vous risquez vraiment, ce que vous devez avoir sous la main, et comment garder la tête froide le jour J.
📌 Info à retenir
L’inspection du travail peut intervenir à tout moment, sans prévenir, pour vérifier la conformité de votre entreprise au droit du travail. Préparez vos documents clés (registre du personnel, DUERP, bulletins de paie…), restez coopératif et gardez en tête qu’un inspecteur est là pour contrôler, mais aussi pour conseiller.
Pourquoi et comment l’inspection du travail peut intervenir chez vous ?
L’institution publique rattachée aux DREETS (Directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités), a pour but de s’assurer que le droit du travail est respecté dans votre entreprise.
Mais ce rôle ne se limite pas à la sanction. Les inspecteurs peuvent aussi vous orienter, vous aider à régulariser certaines situations, ou même intervenir pour prévenir des tensions internes.
Les visites peuvent être planifiées, mais beaucoup d’entre elles sont inopinées.
Et pour cause : le but est d’observer la réalité de votre organisation, pas une version « maquillée pour l’occasion ». C’est pour cela qu’un inspecteur peut débarquer sans prévenir, un mardi matin à 9 h, pendant que vous êtes en pleine réunion.
Selon le rapport de la DGT (Direction Générale du Travail) publié en 2023, près de 200 000 interventions ont eu lieu cette année-là.
La plupart sont déclenchées par des signalements, mais certaines relèvent de campagnes nationales ciblées (dans le BTP, la restauration ou l’aide à domicile), ou même de contrôles aléatoires.
Un conseil simple pour s’y préparer : adoptez une logique de prévention continue, plutôt que de réagir dans la panique.
Que peut faire un inspecteur du travail lors d’une visite ?
Lorsque l’inspecteur arrive, il présente sa carte professionnelle. À partir de ce moment-là, il a le droit d’accéder à tous les locaux professionnels, même en l’absence du dirigeant.
Seuls les lieux servant de résidence sont protégés.
Il peut également :
demander à consulter tous les documents liés à la gestion du personnel (contrats, bulletins de paie, planning, registre unique du personnel)
interroger librement les salariés, sans que vous puissiez être présent
prendre des photos, faire des prélèvements, relever des mesures de bruit ou de température
vérifier les conditions de sécurité et la bonne application des obligations légales
Et surtout : les échanges avec vos collaborateurs sont confidentiels. Vous ne saurez ni ce qu’ils ont dit, ni s’ils ont signalé une anomalie.
Dans les faits, tout se joue sur votre niveau de préparation en amont.
Par exemple, si le DUERP (document unique d’évaluation des risques professionnels) est à jour et accessible, c’est un point positif. S’il est introuvable ou obsolète, cela peut déboucher sur une mise en demeure.
Quels documents doivent être disponibles à tout moment ?
L’inspecteur peut exiger l’accès immédiat à plusieurs documents.
Voici les principaux à tenir prêts, classés et facilement accessibles :
Le registre unique du personnel, qui recense toutes les embauches
Les contrats de travail, signés par les deux parties
Les bulletins de paie, conformes aux obligations légales
La DPAE (Déclaration Préalable à l’Embauche), obligatoire avant toute prise de poste
Le DUERP, actualisé chaque année, avec traçabilité des mises à jour
Le règlement intérieur, dès lors que vous avez 50 salariés ou plus
Les affichages obligatoires, visibles par tous (horaires, coordonnées du médecin du travail, numéros d’urgence, consignes incendie…)
Comment se déroule une visite de l’inspection du travail ?
Une visite peut durer 30 minutes à plusieurs heures, selon la taille de l’entreprise et la complexité du contrôle. En général, l’inspecteur suit un processus en trois temps.
Il commence par se présenter et expliquer la raison de sa venue : contrôle de routine, signalement, ou enquête sectorielle. Il montre sa carte professionnelle, ce qui marque le début officiel de l’intervention.
Ensuite, il inspecte les locaux. Il vérifie l’environnement de travail : sécurité, conditions d’hygiène, respect des horaires, présence des équipements obligatoires (gants, extincteurs, signalétique…). Il peut faire des remarques à ce stade ou poser des questions aux responsables présents.
Enfin, place aux entretiens. Il peut s’entretenir avec des salariés, un représentant du personnel, un manager ou l’employeur. Ces échanges se déroulent en toute confidentialité.
Un retour oral est souvent donné en fin de visite. Il permet de savoir si l’entreprise est conforme, ou s’il y aura une suite administrative ou judiciaire.
Quelles sanctions peuvent tomber après une visite ?
Tout dépend de ce que l’inspecteur observe. Il a plusieurs options, avec un degré de sévérité croissant.
Si les écarts sont mineurs, il peut émettre une observation simple, sans suite formelle. C’est le cas par exemple si un affichage est manquant ou si le DUERP n’est pas mis à jour depuis six mois. Vous aurez alors quelques jours pour corriger.
En cas d’anomalies plus sérieuses, il peut délivrer une mise en demeure. Il fixe alors un délai pour vous mettre en conformité, souvent 1 à 2 mois. Passé ce délai, une nouvelle visite pourra avoir lieu.
L’étape suivante est l’avertissement administratif, transmis par la DREETS. C’est un signal officiel qui reste dans le dossier de votre entreprise.
Si l’inspecteur constate une infraction pénale (travail dissimulé, harcèlement, absence de déclaration), il peut dresser un procès-verbal envoyé au procureur de la République.
Dans les cas les plus graves (danger immédiat pour les salariés), il peut suspendre l’activité sur une zone ou une tâche précise.
D’après l’article L8112-1 du Code du travail, une entreprise encourt jusqu’à 75 000 € d’amende, et le dirigeant peut être poursuivi personnellement, avec des peines allant jusqu’à 2 ans d’emprisonnement en cas de récidive ou de mise en danger délibérée.
Peut-on contester un rapport d’inspection ?
Oui. Si vous jugez que les conclusions de l’inspecteur sont injustifiées ou disproportionnées, vous pouvez utiliser plusieurs voies de recours, à condition d’agir rapidement.
La première est le recours gracieux, directement auprès de l’inspecteur, qui permet d’échanger et de demander une révision du constat, à condition d’avoir des arguments solides et des pièces justificatives à l’appui.
Vous pouvez aussi faire un recours hiérarchique auprès du directeur régional de la DREETS. Ce niveau est utile si vous estimez qu’il y a eu un abus de pouvoir ou une interprétation trop rigide de la loi.
Enfin, le recours contentieux devant le tribunal administratif est une option juridique plus formelle. Il faut être représenté, de préférence par un avocat spécialisé en droit du travail.
⚠️ Le délai maximum pour ces recours est de 2 mois à partir de la notification de la décision. Ne laissez pas passer ce délai.
Quelles sont les situations où vous devez contacter l’inspection du travail vous-même ?
L’inspection du travail ne se manifeste pas seulement lors des contrôles. Dans plusieurs cas, vous avez l’obligation de la prévenir ou d’obtenir son autorisation avant d’agir.
Par exemple, si vous souhaitez licencier un salarié protégé (comme un membre élu du CSE), vous devez impérativement en faire la demande par écrit et attendre l’autorisation de l’inspection. Agir sans cette validation expose à une annulation du licenciement et à des sanctions.
Autre cas courant : l’élaboration ou la modification du règlement intérieur. Dès que votre entreprise atteint 50 salariés, ce document devient obligatoire. Vous devez le soumettre à l’inspection après avoir consulté le CSE, si vous en avez un.
Certaines dérogations doivent aussi être signalées, comme le travail le dimanche ou le dépassement des durées maximales de travail prévues par le Code du travail (10 heures par jour, 48 heures par semaine).
Ne négligez pas ces obligations : un oubli ou une démarche mal faite peut entraîner une annulation de la procédure, voire un contentieux avec l’inspection ou le salarié concerné.
Pour vous aider, la plateforme Télérecours ou les formulaires disponibles sur travail-emploi.gouv.fr permettent d’envoyer facilement vos demandes en ligne.
Comment se préparer pour rester serein en cas de contrôle ?
La meilleure défense, c’est l’anticipation !
Pas dans l’urgence, mais dans une logique de suivi régulier, comme on entretient sa voiture ou on fait ses comptes.
Commencez par organiser vos documents RH dans un espace centralisé : cloud sécurisé, coffre-fort numérique, ou logiciel dédié. Classez-les par type (embauche, sécurité, paie…) et assurez-vous qu’ils sont à jour. N’attendez pas qu’un inspecteur vous demande un document pour le chercher.
Formez vos managers : comment accueillir un inspecteur, quoi dire ou ne pas dire, comment retrouver rapidement les pièces demandées. Il ne s’agit pas de jouer à cache-cache, mais d’être clair et transparent. Un manager qui panique ou refuse un échange peut compliquer inutilement la situation.
Mettez aussi à jour votre DUERP chaque année, ou à chaque évolution notable de votre activité (nouveau poste, déménagement, changement d’outils…).
Enfin, créez une fiche réflexe à garder à l’accueil ou dans votre espace RH : elle récapitule les étapes d’un contrôle, les contacts internes à prévenir, et les documents à présenter.
L’inspection du travail n’est pas une menace
Un contrôle de l’inspection du travail peut faire peur, surtout si vous avez peu de ressources internes. Mais avec un peu de méthode et de rigueur, vous pouvez le vivre comme une étape normale de la vie d’une entreprise.
Rappelez-vous : l’objectif n’est pas de punir, mais de protéger les salariés et d’accompagner les employeurs vers la conformité. En vous préparant, vous renforcez non seulement la sécurité juridique de votre structure, mais aussi sa crédibilité et sa réputation.